La sociologue Aoua Bocar Ly-Tall explore dans son nouvel ouvrage, un autre aspect de l’éminent égyptologue Cheikh Anta Diop, parrain de la première université du Sénégal, dans un livre intitulé «Cheikh Anta Diop, l’humain derrière le savant».
La sociologue Aoua Bocar Ly-Tall explore le côté féministe de l’éminent chercheur Cheikh Anta Diop, qui s’est battu toute sa vie pour restaurer à l’Afrique sa dignité contre l’Occident qui a travesti l’histoire du continent.
Grand égyptologue, panafricaniste convaincu, humaniste, Cheikh Anta montre que le matriarcat a longtemps dominé les vieilles sociétés africaines sedentaires et agricoles, avant l ‘islamisation et la christianisation, contrairement aux autres sociétés indo européennes ou sémites, nomades et pastorales . Malgré son envergure, son aura, Cheikh Anta était un homme humble, grand défenseur des droits des femmes. Mais ce côté ne semble pas suffisamment mis en avant de l’avis de Oua Bocar Ly-Tall. C’est Fort de constat qu’elle a choisi de consacrer cet ouvrage à l’auteur de « Nations nègres et culture » en mettant en exergue ce côté peu connu méconnu de lui.
Quelques passages du livre sur l ‘ Unité Culturelle de l’ Afrique Noire ( Cheikh Anta Diop) ou il analyse déjà les differences entre le mode de production et les linéarités :
«la vie sédentaire et nomade n’a pas seulement engendré de types de familles mais également des formes d’Etat, le collectivisme est la conséquence logique du sédentarisme agricole, il aboutit de bonne heure surtout dans le cas particulier de l’Égypte à ce que Andre Aymard appelle la vocation impériale du Proche-Orient«……..On peut donc s’étonner légitimement qu’il n’y ait pas eu passage du matriarcat au patriarcat. Le caractère agraire et matriarcale de la société égyptienne pharaonique est suffisamment exprimé dans le mythe de Isis et Osiris d’après Fraser, Osiris est le Dieu du blé, l’esprit de l’arbre le Dieu de la fertilité.»
«la femme africaine même après le mariage conserve toute sa personnalité et ses droits. Elle continue à porter le nom de sa famille contrairement à la famille indo européenne qui perd le sien pour prendre celui de son mari» p 45-
«Le caractère sacré de la mere dans les sociétés sédentaires agricoles matriarcale s’adaptent mal à l’idée d’une promiscuité primitive antérieure dont il serait issu partout où celle-ci existait. Il semble qu’elle ait conduit directement à l’Amazonisme qu’il ne faut pas confondre avec le matriarcat. Cette distinction serait faite ultérieurement. «
«La facilité de divorce dans la mariage du berceau matriarcale ne peut en tout objectivité être considéré comme un signe d’infériorité et d’antériorité au point de distinguer une famille dite smic archaïque de celle dite monogamique ou le divorce est quasi impossible. La facilité de séparation ne doit pas être considérée comme révélatrice de mœurs dissolus mais comme l’indice du degré d’épanouissement qu’une société accorde à tous ses ressortissants sans distinction de sexe»
«En Afrique, Egypte et Éthiopie comprise, la femme jouissait d’une liberté égale à celle de l’homme , elle a une personnalité juridique et pouvait occuper toutes les fonctions. La reine Candace d’ethiopie et généralissime de son armée, est déjà émancipée et aucun acte de la vie publique ne lui est étranger. Par contre la femme européenne ne sera même pas émancipé par le code Napoléon comme l’a souligné Engels. Il faudra attendre la fin de la dernière guerre pour voir voter la femme française. «
«En revenant à l’Asie on peut dire que comme à Byzance la succession au trône était réglé que par la violence, l’intrigue, à l’exclusion de toute notion de matriarcat, les rois pères se prirent l’habitude de nommer leur successeur de leur vivant et souvent l’assassinat politique faisait le reste. D’après Maspero, Cyrus se règle sa succession à l’avance en désignant son fils aîné Cambyse qui tue son frère cadet pour éviter toute rivalité. «
«le matriarcat n’est pas le triomphe absolu et cynique de la femme sur l’homme. C’est un dualisme harmonieux, une association acceptée par les 2 sexes pour mieux bâtir une société sédentaire où chacun s’épanouisse pleinement en se livrant à l’activité qui est la plus a meme avec sa nature physiologique. Un régime matriarcale, loin d’être imposée à l’homme par des circonstances indépendantes de sa volonté est acceptée et défendue par lui. «p114
«L’amazonisme est loin d’être une variante du matriarcat et apparaît comme la conséquence logique des excès d’un régime patriarcal outrancier. Tout chez les amazones, habitudes, fait relever, lieu d’habitat, incline a interpréter leur régime dans le sens qui vient d’être indiqué. «
«le règne de la reine Candace fut véritablement historique: elle est contemporaine de César Auguste à l’apogée de sa gloire. Celui-ci après avoir conquis l’Égypte poussa ses armées à travers le désert de Nubie jusqu’aux frontières de l’Éthiopie. D’après Strabon elles étaient commandées par le général Pétron. La reine prit elle-même le commandement de son armée à la tête de ses troupes, elle chargea contre les soldats romains comme le fera plus tard Jeanne d’Arc contre l’armée anglaise.

La perte d’un œil au combat ne fit que redoubler son courage, cette résistance héroïque impressionna toute l’Antiquité classique non pas parce que la reine était une négresse mais parce qu’il s’agissait d’une femme. On n’ était pas encore habitué dans le monde indo- européen à l’idée d’une femme jouant un rôle politique et social. Strabon rapporte que César Auguste qui se reposait alors sur une île de la Méditerranée à Rhodes donna satisfaction entière à la délégation que la reine lui avait mandaté. Cette résistance glorieuse est resté dans la mémoire des soudanais. Le prestige de Candace fut tel, que toutes les reines postérieures ont porté génériquement le même nom et Hérodote rapporte que les éthiopiens macrobiens sont les plus beaux et les plus grands de tous les hommes, ils sont doués d’une santé à toute épreuve, en leur appliquant le qualitatif de macrobien il veut faire allusion à leur longévité. «
Source: Unité Culturelle de l’ Afrique Noire et Seneplus.
